Factures fictives ou de complaisance: l’amende fiscale de 50 % est validée
FISCAL 29 nov. 2021

Factures fictives ou de complaisance: l’amende fiscale de 50 % est validée


Saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), le Conseil constitutionnel a déclaré conformes à la Constitution les dispositions du Code général des impôts qui sanctionnent d’une amende de 50 % le fait d’émettre ou de recevoir une facture fictive ou de complaisance.

 

les faits et la procédure

Le Conseil d’État a transmis en juillet 2021 au Conseil constitutionnel une QPC (question prioritaire de constitutionnalité) relative à la constitutionnalité du 1 du I de l’article 1737 du CGI, qui punit d’une amende de 50 % des sommes versées ou perçues le fait, pour l'émetteur ou le destinataire d'une facture, soit de travestir ou de dissimuler l'identité ou l'adresse de ses fournisseurs ou de ses clients, ou de certains éléments d'identification obligatoires, soit de sciemment accepter l'utilisation d'une identité fictive ou d'un prête-nom.

Selon la société requérante ayant soulevé la QPC, cette amende devait être déclarée contraire à la Constitution, car elle méconnaitrait deux principes constitutionnels :

  • le principe de proportionnalité des peines, dès lors que :
    • l’amende s’applique à la fois au fournisseur et à son client ;
    • l'amende n'aurait qu'un lien indirect avec la gravité des manquements réprimés et serait sans aucun lien avec l'éventuel préjudice financier subi par le Trésor public ;
    • son montant n'est pas plafonné, même en l'absence de comportement frauduleux et quel que soit l'avantage retiré ;
    • l'administration ou le juge ne peuvent en moduler le montant.
  • le principe de nécessité des délits et des peines, puisque cette amende sanctionne des faits qui peuvent également être qualifiés de manœuvres frauduleuses justifiant une majoration de 80 % des droits éludés.

 

la solution rendue

Dans une décision du 21 octobre 2021 (n° 2021-942 QPC), le Conseil constitutionnel a déclaré l’amende fiscale de 50 % conforme à la Constitution. Il considère en effet que cette amende ne méconnait ni le principe de proportionnalité des peines, ni celui de nécessité des délits et des peines.

Conformité au principe de proportionnalité des peines

Pour rendre leur décision, les Sages ont, en premier lieu, retenu que le législateur a poursuivi l'objectif de valeur constitutionnelle de lutte contre la fraude fiscale en réprimant par une amende fiscale des comportements visant à faire obstacle :

  • au contrôle des comptabilités tant du vendeur que de l'acquéreur d'un produit ou d'une prestation de services ;
  • et au recouvrement des prélèvements auxquels ils sont assujettis.

En second lieu, ils ont considéré qu’en fixant l'amende encourue en proportion du montant des sommes versées ou reçues au titre d'une facture irrégulière, le législateur a instauré une sanction dont l'assiette est en lien avec la nature de l'infraction.

En outre, le caractère intentionnel du manquement de la part d’un professionnel dans le cadre de son activité justifie le taux de 50 % de l’amende. Ce taux n’est donc pas manifestement disproportionné au regard de la gravité des manquements que le législateur a entendu réprimer.

Conformité au principe de nécessité des délits et des peines

Après avoir rappelé que la seule circonstance que plusieurs incriminations soient susceptibles de réprimer un même comportement ne peut caractériser une identité de faits au sens des exigences résultant de l'article 8 de la Déclaration de 1789 que si ces derniers sont qualifiés de manière identique, le Conseil constitutionnel considère que l’amende de 50 % vise à réprimer le seul recours à des factures fictives ou de complaisance, indépendamment du fait que des droits aient ou non été éludés, quand bien même les mêmes faits peuvent justifier l’application de la majoration de 80 % prévue par l’article 1729 du CGI en cas de manœuvres frauduleuses.

En effet, si le recours à des factures fictives ou de complaisance est susceptible de caractériser des manœuvres frauduleuses au sens de l'article 1729 du code général des impôts, la caractérisation de telles manœuvres ne procède pas nécessairement de cette seule circonstance et peut résulter d'autres éléments de fait.

 

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