Redressement fiscal d'une société à l'IR : quelle responsabilité pour le dirigeant ?
FISCAL 20 sept. 2021

Redressement fiscal d'une société à l'IR : quelle responsabilité pour le dirigeant ?


Le dirigeant d’une société civile relevant de l’impôt sur le revenu, qui n’a pas exécuté les résolutions votées en assemblée générale et qui a déposé des déclarations fiscales incomplètes et non sincères, peut être condamné à dédommager les associés des pénalités fiscales prononcées contre eux.

 

Comment la responsabilitÉ du dirigeant dÉfaillant peut-elle Être engagÉe ?

Pour engager la responsabilité pour faute du dirigeant d’une société, les associés disposent de deux formes d’actions en justice :

  • l’action sociale, qui vise à réparer le préjudice causé à la société ;
  • l’action individuelle, qui vise à réparer le préjudice causé à l’associé qui l’exerce.

Pour que l’action individuelle aboutisse à une réparation, il est nécessaire que l’associé, personne physique, établisse un préjudice personnel distinct de celui subi par la personne morale. Si le préjudice invoqué n’est que le corollaire de celui subi par la société, la responsabilité du dirigeant ne pourra pas être retenue.

 

les faits et la procÉdure

Dans un arrêt du 12 mai 2021 (n° 19-13942), la Cour de cassation offre une illustration rare de la réussite d’une action individuelle en condamnant le gérant d’une société civile de construction-vente (SCCV) en cours de liquidation à réparer les préjudices financier et moral résultant pour l’associé du redressement fiscal notifié à la société.

En l’espèce, à la suite de la vérification de la comptabilité de la SCCV, il était apparu que le gérant n’avait pas exécuté les résolutions de l’AGE et avait poursuivi l’activité de la société tout en effectuant des déclarations fiscales non sincères et incomplètes.

Le résultat de la SCCV ayant été rehaussé par le service vérificateur, les associés avaient reçu une proposition de rectification de leur impôt sur le revenu à proportion de leur participation dans la société, assortie d’une majoration de retard et d’une pénalité de 40 % pour manquement délibéré.

L’un des associés avait assigné le gérant en réparation du préjudice constitué, selon lui, par ce rehaussement d’imposition et les pénalités fiscales associées. Condamné en première instance puis en appel, le gérant s’était pourvu en cassation.

 

la solution rendue

La Cour de cassation rejette le pourvoi et confirme la décision rendue par les juges du fond en précisant l’étendue du préjudice de l’associé. Elle considère que le préjudice personnel invoqué par l’associé est constitué uniquement par l'application des pénalités et intérêts de retard et la nécessité de trouver rapidement une solution de financement, lequel, sans se confondre avec celui de la société, est en lien direct avec les fautes du dirigeant. L’associé est donc fondé à demander réparation pour les intérêts et pénalités qui sont venus majorer son imposition et qui auraient pu être évités si le dirigeant avait convenablement exécuté sa mission.

En l’espèce, c’est donc un préjudice financier de 33 998 € (pénalités fiscales et intérêts de retard) et un préjudice moral de 5 000 € (nécessité de trouver rapidement un financement) que le gérant est définitivement condamné à réparer.

En revanche, les cotisations d’impôt supplémentaires mises à la charge de l’associé ne peuvent pas s'analyser, selon la Cour, comme un préjudice en lien de cause à effet avec les fautes du gérant, dès lors que l'impôt sur le revenu qui est réclamé à l’associé est dû par celui-ci quelles que soient les circonstances.

À NOTER
Bien que la solution ait été rendue à l’encontre du gérant d’une SCCV, elle nous semble transposable aux dirigeants de toute société de personnes (SCI ou SCP, notamment) relevant de l’impôt sur le revenu.

En effet, lorsqu’une société est passible de l’impôt sur le revenu, son résultat fiscal est déterminé au niveau de la société mais l’impôt dû est acquitté par chacun des associés à proportion de ses droits dans la société. En cas de redressement fiscal, ce sont donc les associés qui supportent personnellement le coût des intérêts de retard et pénalités.

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